La transcendance et le voile symbolique.
C'est vrai en religion comme en paysage. Il y a toujours une distance symbolique pour le non initié. Hors de, on ne voit rien. Dans, on perçoit. Il y a une tension entre la forme et ce qui se cache derrière. Érotisme formel. Toi, paysagiste, que faire si tu ne peux lire les cartes? En ton esprit déployer le dessin plat, construire entre les courbes de niveaux la dimension absente? Reconnaître les couleurs, les ondulations, les limites cachées révélées par la vue aérienne? Si tu ne sais pas décoder les signes sur l'IGN?
Le paysagiste est un cartomancien. Il va de l'abstraction de la carte à la chair du terrain, de la distance symbolique à la vivacité du motif. Il y lit l'avenir d'un territoire. Une carte n'a pas d'horizon. Mais l'omniscience qu'elle permet peut donner le vertige. Le répertoire infini. Un territoire aux confins se dérobant sans cesse. Il n'y a plus de marge, de flou, d'ignorance, de latence. La carte sait. Elle remplit. Sa puissance, c'est qu'elle constate ce qui est. Ou plutôt existe, car peu est, sur la carte, les choses existent les unes sur les autres.
La puissance cartographique est dans sa constante actualisation. Des bilans d'expérience. De compétences. De cohérence. Elle rend compte. C'est une communion des saints, un accès à un savoir collectif incroyable, d'une technicité prodigieuse, fruit d'un nombre inimaginable d'heures de travail à relever la forme et la transcrire, plate, dans sa juste mesure. Elle est accès au dialogue avec les ancêtres, les morts, ce qui ont vécus sur les territoires qu'elles représentent et ceux qui les ont frôlé pour dessiner la peau/le corps qui les portait. La carte, largeur et profondeur, comme dialogue du Père et du Fils. Relation transcendantale. Immanence, la profondeur du monde, l'Esprit...où est-il? Il plane au dessus des eaux. Il échappe. Ligne de fuite. Il disparaît. Il joue. Il surgit. Il se cache dans la brise.
Avril 2015
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